Le 17 juin 2020, la loi n°2020-734 « relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne » a été promulguée, elle porte notamment sur l'activité partielle et la monétisation de certains congés, l'intéressement par accord unilatéral ou, encore, le dispositif d'activité réduite pour le maintien de l'emploi.
Le 17 juin 2020, la loi n°2020-734 « relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne » a été promulguée (voir le texte en intégralité).
Voilà les dispositions qui ont retenu plus particulièrement notre attention
1/6 – Activité partielle et monétisation de certains congés (article 6)
Il devient possible de monétiser certains jours de congés :
- Un accord d'entreprise ou de branche peut autoriser l'employeur à imposer aux salariés placés en activité partielle et qui bénéficient du maintien intégral de leur rémunération sur le fondement de stipulations conventionnelles, d'affecter des jours de repos conventionnels ou une partie de leur congé annuel excédant vingt-quatre jours ouvrables à un fonds de solidarité, en vue d’être monétisés pour compenser tout ou partie de la diminution de rémunération subie, le cas échéant, par les autres salariés placés en activité partielle (article 6-I) ;
- Un accord d'entreprise ou de branche peut autoriser la monétisation des jours de repos conventionnels ou d'une partie de leur congé annuel excédant vingt-quatre jours ouvrables, sur demande d'un salarié placé en activité partielle en vue de compenser tout ou partie de la diminution de rémunération qu'il a subie, le cas échéant (article 6-II).
Modalités de mise en œuvre :
- Les jours de repos conventionnels et de congé annuel susceptibles d'être monétisés sont les jours acquis et non pris, qu'ils aient ou non été affectés à un compte épargne-temps (article 6-III) ;
- Les jours de repos conventionnels sont ceux prévus par (article 6-IV) :
- Un dispositif de réduction du temps de travail maintenu en vigueur en application de la loi n°2008-789 du 20 août 2008 ;
- Un dispositif de jours de repos conventionnels mis en place dans le cadre d’un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine;
- Une convention de forfait conclue sur le fondement des articles L3121-53 et suivants
- Le nombre total de jours de repos conventionnels et de congé annuel pouvant être monétisés ne peut excéder cinq jours par salarié (article 6-V).
Ces dispositions s'appliquent à compter du 12 mars 2020 et jusqu'au 31 décembre 2020.
2/6 – Intéressement par accord unilatéral dans certaines entreprises (article 18)
- Maintien des termes de l’article L3312-5-I du Code du travail:
Selon l’article L3312-5-I, les accords d'intéressement sont conclus pour une durée de trois ans, selon l'une des modalités suivantes :
- Par convention ou accord collectif de travail ;
- Par accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ;
- Par accord conclu au sein du comité social et économique ;
- A la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d'un projet d'accord (selon certaines modalités prévues dans le Code).
L’article précise qu’en l’absence de demande de renégociation dans les trois mois précédant la date d'échéance de l'accord, ce dernier est renouvelé par tacite reconduction pour une durée de trois ans, si l'accord d'origine en prévoit la possibilité.
- Création de l’article L3312-5-II du Code du travail:
Un nouvel article L3312-5-II prévoit désormais, pour les entreprises de moins de 11 salariés dépourvus de représentants du personnel, la possibilité de mettre en place un régime d'intéressement par décision unilatérale, pour une durée comprise entre un et trois ans, à condition qu'aucun aucun accord d'intéressement ne soit applicable ni n'ait été conclu dans l'entreprise depuis au moins cinq ans. Le régime ainsi mis en place vaut accord d'intéressement au sens de l'article 81 du code général des impôts (définition des revenus imposables et affranchissement de l’impôt).
En revanche, au terme de la période initiale d’un à trois ans, l'intéressement ne peut être reconduit qu'en empruntant l'une des modalités prévues par l’article L3312-5-I ci-dessus.
Toutes les dispositions relatives à l’intéressement s’appliquent à ce régime mis en place de façon unilatérale (sauf deux exceptions concernant des dispositions particulières peu usitées) ainsi que les dispositions communes au « Dividende du travail » (intéressement, participation et épargne salariale) à l’exceptions de certaines dont, notamment, les règles relatives à la « Participation aux assemblées générales des actionnaires de la société » (article L3347-1 nouveau).
3/6 – Possibilités d’aménagement en matière de Contrat à durée déterminée et de contrat de mise à disposition (article 41)
- CDD:
Par dérogation aux dispositions du Code du travail (qui sont d’ordres publiques ou qui réservent les dérogations à une convention ou un accord de branche étendu), en matière de contrat de travail à durée déterminée, un accord collectif d’entreprise peut (article 41-I) :
- Fixer le nombre maximal de renouvellements possibles pour un contrat de travail à durée déterminée. Ce nombre ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Cette faculté n’est toutefois pas ouverte aux CDD conclus en application de l'article L1242-3 du Code du travail (CDD visant à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi et CDD pour complément de formation professionnelle) ;
- Fixer les modalités de calcul du délai de carence entre deux contrats, prévu à l'article L1244-3 du Code du travail et prévoir les cas dans lesquels ce délai de carence n'est pas applicable
- Contrats de mise à disposition :
Par dérogation aux dispositions légales, une entreprise utilisatrice qui conclue des contrats de mise à disposition avec une entreprise de travail temporaire peut, par accord collectif d'entreprise (article 41-II):
- Fixer le nombre maximal de renouvellements possibles pour un contrat de mission. Ce nombre ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice ;
- Fixer les modalités de calcul du délai de carence entre deux contrats, prévu à l'article L1251-36 et prévoir les cas dans lesquels le délai de carence n'est pas applicable » ;
- Autoriser le recours à des salariés temporaires dans des cas non prévus à l'article L1251-6.
- Précisions communes au CDD et au contrat de mise à disposition :
Les stipulations de l'accord d'entreprise conclu en application du présent article sont applicables aux contrats de travail conclus jusqu'au 31 décembre 2020.
Par dérogation à l'article L2253-1 du code du travail (hiérarchies des normes), les stipulations de l'accord d'entreprise ainsi conclu prévalent sur les stipulations éventuelles découlant d’une convention de branche ou d'un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large ayant le même objet.
4/6 – Aménagement du prêt de main d’œuvre à but non-lucratif (article 52)
L’article L8241-2 du Code du travail prévoit les modalités de recours au prêt de main d’œuvre à but non lucratif, ce qui nécessite :
- L’accord du salarié ;
- La signature d’un avenant ;
- La signature d’une convention de mise à disposition entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice.
L’article 52 de la loi du n°2020-734 apporte des modalités particulières de recours au prêt de main d’œuvre à but non-lucratif jusqu’au 31 décembre 2020 :
- La convention de mise à disposition peut porter sur la mise à disposition de plusieurs salariés;
- L’avenant au contrat de travail peut ne pas comporter les horaires d'exécution du travail. Il précise en ce cas le volume hebdomadaire des heures de travail durant lesquelles le salarié est mis à disposition. Les horaires de travail sont fixés par l'entreprise utilisatrice avec l'accord du salarié ;
- L'information et la consultation préalables du CSE peuvent être remplacées par une consultation sur les conventions signées, dans le délai maximal d'un mois à compter de la signature de la convention de mise à disposition.
Enfin, pour être licite, le prêt de main d’œuvre ne doit pas avoir de but lucratif ce qui est le cas lorsque l'entreprise prêteuse ne facture à l'entreprise utilisatrice que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l'intéressé (article L8241-1 du Code du travail).
L’article 52 de la loi du n°2020-734 aménage la notion de but lucratif dans les cas où l'intérêt de l'entreprise utilisatrice le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19 et qu'elle relève de secteurs d'activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale déterminés par décret.
Pour ces entreprises, les opérations de prêt de main-d'œuvre n'ont pas de but lucratif pour les entreprises utilisatrices « même lorsque le montant facturé par l'entreprise prêteuse à l'entreprise utilisatrice est inférieur aux salaires versés au salarié, aux charges sociales afférentes et aux frais professionnels remboursés à l'intéressé au titre de sa mise à disposition temporaire ou est égal à zéro ».
5/6 – Dispositif d’activité réduite pour le maintien de l’emploi (article 53)
- Définition et obligation d’un Accord collectif préalable (article 53-I):
Il est institué un dispositif spécifique d'activité partielle dénommé Activité réduite pour le maintien en emploi destiné à assurer le maintien dans l'emploi dans les entreprises confrontées à une réduction d'activité durable qui n'est pas de nature à compromettre leur pérennité.
Ce dispositif doit obligatoirement être mis en place par un Accord collectif qui doit définir :
- La durée d'application de l'accord ;
- Les activités et les salariés concernés par l'activité partielle spécifique ;
- Les réductions de l'horaire de travail pouvant donner lieu à indemnisation à ce titre ;
- Les engagements spécifiquement souscrits en contrepartie, notamment pour le maintien de l'emploi.
Un décret en Conseil d'Etat doit encore préciser le contenu de l'Accord.
- Procédure pour bénéficier du dispositif (articles 53-I à 53 VI):
L’Accord collectif pouvant mettre en place le dispositif d’activité réduite est (article 53-I) :
- Soit un accord collectif d'établissement, d'entreprise ou de groupe ;
- Soit un accord collectif de branche étendu.
Attention, dans l’entreprise où le dispositif est prévu par un accord collectif de branche étendu, le législateur impose d’établir, après consultation du CSE, lorsqu'il existe, un Document conforme aux stipulations de l'accord de branche et définissant les engagements spécifiques en matière d'emploi (article 53-II).
Les conditions d'application et de renouvellement du Document conforme seront précisées par le décret annoncé (article 53-II).
Le tableau ci-après résume la procédure :
Dispositif prévu par accord collectif d'établissement, d'entreprise ou de groupe |
Dispositif prévu par un accord de branche étendu |
Accords ou Documents soumis à validation ou homologation (article 53-II) |
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Accord collectif d’établissement Accord collectif d’entreprise Accord collectif de groupe |
Document conforme à l’accord collectif de branche étendu |
Obligation de transmission à l’autorité administrative (article 53-III) |
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L’Accord collectif est transmis pour validation |
Le Document conforme est transmis pour homologation |
N-B : L'accord de branche est étendu dans les conditions définies à l'article L2261-15 du code du travail, c’est-à-dire, notamment, par arrêté du ministre chargé du travail |
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Procédure de validation et d’homologation |
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(article 53-IV) |
(article 53-V) |
L'autorité administrative valide l'Accord dès lors qu'elle s'est assurée :
1/ Des conditions de validité et de la régularité de la procédure de négociation ; 2/ De la présence dans l'accord de l'ensemble des dispositions mentionnées à l’article 53-I. |
L'autorité administrative homologue le Document conforme après avoir vérifié :
1/ La régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, lorsqu'il existe ; 2/ La présence de l'ensemble des dispositions mentionnées à l’article 53-I ; 3/ La conformité aux stipulations de l'accord de branche ; 4/ La présence d'engagements spécifiques en matière d'emploi mentionnés à l’article 53-II. |
La procédure de validation est renouvelée en cas de conclusion d'un avenant de révision |
La procédure d'homologation est renouvelée en cas de reconduction ou d'adaptation du document |
Notification de la décision par l’autorité administrative (article 53-VI) |
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L'autorité administrative notifie à l'employeur la décision de validation dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l'Accord collectif |
L'autorité administrative notifie à l'employeur la décision d'homologation dans un délai de 21 jours à compter de la réception du Document conforme |
La décision est motivée |
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L’autorité administrative notifie dans un délai de 15 jours la décision au CSE lorsqu'il existe et aux organisations syndicales représentatives signataires lorsqu'elles existent |
L’autorité administrative notifie dans un délai de 21 jours la décision au CSE lorsqu'il existe |
Décision implicite de l’administration (article 53-VI) |
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Le silence gardé par l'autorité administrative pendant le délai de 15 jours vaut décision d'acceptation de validation |
Le silence gardé par l'autorité administrative pendant le délai de 21 jours vaut décision d'acceptation d’homologation |
L'employeur transmet une copie de la demande de validation, accompagnée de son accusé de réception par l'administration, au CSE lorsqu'il existe et aux organisations syndicales représentatives signataires lorsqu'elles existent |
L'employeur transmet une copie de la demande d'homologation, accompagnée de son accusé de réception par l'administration, au CSE lorsqu'il existe
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Obligation d’affichage (article 53-VI) |
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La décision de validation ou, à défaut, les documents précités et les voies et délais de recours sont portés à la connaissance des salariés par voie d'affichage sur leurs lieux de travail ou par tout autre moyen permettant de conférer date certaine à cette information. |
La décision d'homologation ou, à défaut, les documents précités et les voies et délais de recours sont portés à la connaissance des salariés par voie d'affichage sur leurs lieux de travail ou par tout autre moyen permettant de conférer date certaine à cette information. |
- Dispositions diverses (articles 53-VII à 53-IX):
Le pourcentage de l'indemnité et le montant de l'allocation peuvent être majorés dans des conditions et dans les cas déterminés par décret, notamment selon les caractéristiques de l'activité de l'entreprise (article 53-VII).
Ne sont pas applicables au régime d'activité partielle spécifique (article 53-VIII) :
- La majoration de l’indemnité en cas d’action de formation (article L5122-2 alinéa 2) ;
- Le dispositif d’activité partielle pour une partie seulement des salariés (article 10ter de l’ordonnance n°2020-346 du 27 mars 2020) ;
- Les stipulations conventionnelles relatives à l'activité partielle, conclues avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
Le dispositif d’activité réduite est ouvert aux Accords ou Documents conformes transmis à l'autorité administrative pour validation ou homologation au plus tard le 30 juin 2022.
6/6 – Diverses dispositions de la loi
Article 11 : Précisions de l’effet de la période d’activité partielle sur le droit à pension de retraite.
Article 12 : Précisions sur le maintien de certaines garanties (le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité, les risques d'inaptitude et le risque chômage) pendant le placement en activité partielle.
Article 13 : Précisions concernant les expatriés rentrés en France entre le 1er mars 2020 et le 30 septembre 2020.
Article 43 : Report des deux prochains scrutins visant à mesurer l'audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés au premier semestre 2021 et au deuxième semestre 2024 (modification l’article 1-I de l'ordonnance n°2020-388 du 1er avril 2020).
Article 50 : Précisions concernant la prolongation des droits en matière de revenus de remplacement.
Article 1 : Autorisation donnée au gouvernement de prendre des ordonnances dans le domaine de la loi, « dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi », permettant, notamment : « l'adaptation des dispositions relatives à l'activité partielle afin de limiter les fins et les ruptures de contrats de travail, d'atténuer les effets de la baisse d'activité, de favoriser et d'accompagner la reprise d'activité » et ce, notamment, « en permettant aux salariés de démontrer leurs relations contractuelles par tous moyens écrits » et « en adaptant les règles aux caractéristiques des entreprises en fonction de l'impact économique de la crise sanitaire sur ces dernières, à leur secteur d'activité (etc…) ».